Le jeudi en poésie, ce n'est pas ici, c'est là
En marge du jeudi en poésie, je continue à égrener mon Alphabet en poésie,
dimanche avec la lettre V, aujourd'hui avec W (1) et (2),
dans deux ou trois jours avec X.
Avec l'approche de la fin de l'alphabet, les possibiilités d'llustrer les dernières lettres se réduisent.
W double V. Les mots du dictionnaire qui commencent par cette lettre sont empruntés à d'autres langues, désignant des lieux intimes (water-closet ou WC, emprunté à l'anglais), plus propices aux mots fléchés qu'à la lecture de poèmes, linges de besognes aussi nécessaires qu'ingrates telle la wassingue (emprunté au flamand) ou destinés aux plus beaux habits tel le wax (emprunté à l'anglais) mesurant la puissance énergétique avec le watt (anglais encore) ou un titre de créance gagé, tel le warrant (anglais toujours), domaine inspirant peu les poètes, peu familiers de tels papiers, encore que certains créanciers auraient eu le nez creux de gager sur la renommée future d'un Verlaine ou d'un Rimbaud ...
Ah pourquoi Jacques Brel n'a-t-il pas chanté les Wallonnes, comme il a fait valsé les Flamandes ?
La Walkyrie chante à l'opéra, le western fait son cinéma. Nombreux ont été ou sont les artistes qui cherchent leur inspiration dans le whisky ou d'autres alcools. Apollinaire mit Alcools en titre de l'un de ces recueils les plus célèbres.
Mais est-il responsable de mettre à l'honneur, une béquille au mal-être, muse quelquefois, mais tant délétère ?
J'ai musardé dans le bestiaire de Robert Desnos. Mais je n'y ai trouvé ni wallaby ni watipi.
Et comme avec le V je vous avais fait voyager jusque dans la Voie lactée d'Apollinaire, je pensais bien trouver des envolées poétiques avec les trains. Vous voyez où je veux en venir ?
Hmmm ! Je ne croyais pas au succès de ma requête wagon + poésie. Eh bien, je me trompais.
Ce n'est pas un mais deux poèmes que j'ai trouvés.
Deux poèmes que j'ai également envie de partager avec vous.
Celui-ci, vous connaissez tous le poète. Peut-être pas ce poème.
Encore moins les circonstances de son écriture.
Rêvé pour l'hiver
L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
Et tu me diras : « Cherche ! » en inclinant la tête,
- Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
- Qui voyage beaucoup...
Arthur Rimbaud, En wagon, ,
recopié dans Le cahier de Douai, (deuxième cahier), le 7 octobre 1870.
Arthur Rimbaud a écrit ces vers à l'âge de 15 ans, alors qu'il rentre (en train donc) à Douai chez son professeur de Réthorique, Georges Izambard, au retour de sa première fugue à Paris où il a été cueilli à la gare du Nord et mis en prison pour titre de transport irrégulier. Il faut dire qu'on est à la veille de la bataille de Sedan. Son professeur a payé sa caution et un billet de train et lui a offert l'hospitalité chez ses tantes avant qu'il ne regagne la ferme familiale. Mais déjà, l'adolescent rêve d'autres fugues.
Arthur Rimbaud, 1854 - 1891
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