~ Billet 329 ~
En prélude, l'évocation d'Edgar Morin au talent et à l'amour que mettait sa femme pour faire de leur domicile un havre, un cocon, précisément un nid.
Juste le temps de retrouver les pages où il décrit avec une émotion retenue tout l'amour partagé qu'il peut y avoir à cette activité.et je grapille ces quelques phrases extraites des pages 68 et 69 du chapitre Nous.
Edwige, l'inséparable, Edgar Morin, éditions Fayard, 2009
" Mais elle rêvait d'un vrai nid et se mit à le chercher [...] Moi, incrusté rue des Arquebusiers, je répugnais à déménager, mais Edwige a réussi à "retirer son bigorneau avec une épingle". |
La petite fermière Lajemy proposait un Casse-tête de la semaine tout en douceur : Cocooning.
Le cocooning n'est pas tout à fait l'activité décrite ci-dessus, elle en est plutôt la résultante recherchée si le nidification est réussie.
Dans les années 1980, cet anglicisme est devenu tellement à la mode qu'il est passé dans le langage courant, en mode positif et actif (pour faire son nid comme l'écrit joliment Edgar Morin à propos de sa compagne de tant d'années mais surtout dans un mode d'incitation à décorer son intérieur et donc à acheter), ringardisant l'expression voisine mais plutôt péjorative et passive de comportement casanier.
Point besoin par le froid engivré du début de semaine de me creuser beaucoup pour mettre en mots mes impressions. Même mon chat, ce n'est pas très original, m'avait inspiré une photo pour l'illustrer, tant il est vrai qu'ils sont les champions en ce domaine.
J'avais profité d'un samedi et d'un dimanche tranquilles pour vous proposer un conte oriental sur Une Création du monde, j'avais renoncé une journée de plus à rédiger quelques vraies cartes pour la nouvelle année. J'avais décroché mon téléphone pour échanger des voeux et des nouvelles immédiates malgré les distances.
Lundi, manquait juste l'énergie et une connection internet défaillante, puis le temps.
Mardi, je me consacrais à la ronde joyeuse des prénoms du mercredi après une matinée sous la couette pour recharger mes batteries à plat et une après-midi pastel.
La ritournelle est venue sous mes doigts sans peine. Me restait l'illustration. J'ai trouvé des photos magnifiques sur Internet mais dans le doute, et par amusement, j'ai préféré m'inspirer de l'une d'elle pour exquisser, vite fait, le dessin d'Igor le ténor que j'ai mis en ligne.
Il était tard, je n'avais pas pu rattraper le retard pris dans mes visites bloguesques à cause de la connection sans doute givrée elle aussi.
Je me sentais dans cet état indéfinissable que je connaissais trop bien. Peu fréquent. Une sorte de sensation de flottement, une léger tremblement intérieur, un désarroi (angoisse serait trop fort) indéfinissable.
Demain mercredi, je mettrais en forme ma vision du "cocooning".
... en décrivant mes premières heures d'éveil, à flaner dans le noir en écoutant bien au chaud dans mon lit ma radio du matin.
Celles et ceux qui me lisent depuis longtemps ont sans doute ici ou là compris que j'écoutais France Inter. Une chronique arrivée à propos m'avait même inspiré un billet pour Bigornette.
Mais voilà ! C'est dans un demi-sommeil que la nouvelle du séisme à Haïti s'est vaguement infiltrée dans mon esprit. Je n'ai pas immédiatement pris la mesure de la gravité de l'information. Mais au bulletin suivant, je prenais conscience de ce qui se disait là dans le poste. La tiédeur de l'édredon et le confort des draps de flanelle, en dépit des petits 15° de la chambre, autant par économie que parce que la chaleur artificielle des convecteurs m'indispose, me semblent tout à coup bien dérisoires. Et bien futile et déplacé de m'être préparée à décrire avec délectation ces petits bonheurs dedans quand dehors il fait froid. Bien sûr avec la conscience de la chance d'avoir un toit. Mais là, c'était trop tout d'un coup. Je ne pouvais plus.
Alors j'ai laissé passer la crise. La terre n'était pas calmée. D'ailleurs, mercredi soir, le chat est soudainement sorti de sa léthargie pour faire des bonds tout à fait inhabituels dans toute la pièce pendant que j'étais au téléphone. Sur le moment je me suis étonnée de cette lubie inhabituelle sans cause apparente. J'ai compris en apprenant que les sismographes de Paris percevaient les secousses. Car je me souviens de l'affolement de la chatte de mon amie un matin à La Rochelle, juste avant que les verres ne tintent étonnamment et que de la rue monte une rumeur semblable à celle d'un train. Rien de comparable il est vrai avec l'effroyable catastrohe qui vient d'accabler ce peuple et ce pays après les inondations de 2008.
Hier soir, je suis allée faire un tour du côté des définitions. Pour retrouver une motivation, et une inspiration.
J'ai découvert avec satisfaction le nom québécois de coconage, que l'office québecois de la langue française définit comme le « comportement psychosocial qui se caractérise par une tendance au repli dans le cocon protecteur du domicile que l'on tente de rendre le plus douillet possible ».
Mais j'ai aussi découvert, et cette découverte m'interpelle bien davantage, que le mot cocooning aurait été utilié par l'écrivain anglais Edward Morgan Forster dans une nouvelle d'anticipation (on dirait science fiction maintenant) de 1909, The machine stops, où il décrit un futur où les êtres humains, cocoonant dans le sous-sol terrestre, son sous la domination totale de la technologie, où l'humanité va à sa perte avec fatalisme, les systèmes fonctionnant de plus en plus mal !
En quelque sorte, outre une humanité à son déclin, sous l'emprise de la machine, il pressentait (au sous-sol près, et encore ...) quelques blogueurs compulsifs devant leur machine dévorante !
Pour me réconforter, je suis, entre deux coupures de connection internet, allée furtivement sur les blogs des coconeuses(eurs). Sourires ... amusement d'y voir nos charmants compagnons nous montrer avec talent l'art du cocooning.
Evidemment je vous montre le chat en pleine activité de coconage. Non, non,vous n'aurez pas sa course effrénée. Mais notez que, trop cabot, il n'a pas résisté à ouvrir les yeux dès qu'il a senti l'appareil photo posé sur lui. Il est vrai qu'il se prenait déjà pour une diva dans Cha cha cha.
Et pour faire bonne mesure, voici Vénus, la chatte de ma soeur Jacotte qui n'est pas moins experte dans l'art de la sieste.