Pour Mil et Une
Pour mon envoi à Mil et Une illustrant le sujet de la semaine 49 (à voir à votre choix tout de suite ou après lecture), j'avais assorti mon texte, avant de lui trouver un titre qui aille avec l'image, d'une phrase d'introduction.
Préambule : l'image de la semaine m'a renvoyé à un texte que j'avais écrit en 2009. Celui qui suit en est un raccourci.
Elle écarquille, incrédule, ses yeux devant la vitrine.
Sur le côté, en retrait, une épinette* sans doute hors d'âge, hors de prix, probablement désaccordée, mais tellement gracieuse sur ses pieds galbés trop chétifs et ses semis de fleurs peintes sur la laque crème craquelée.
Et au milieu de cette joyeuse pagaille savamment organisée, il est là, trônant tel un trophée ! Avec une étiquette « Réservé ».
Une moue de dépit !
Le maître des lieux est occupé avec un familier, un vieillard aux blancs cheveux et aux doigts de pianiste.
Elle reste un moment dans le rai de lumière. Un hum ! Leurs regards l'évaluent.
Pas le vêtement d'un acheteur potentiel ! Tout est rare ici. D'exception, onéreux.
- Vous souhaitez voir quelque chose en particulier ?
- Oui, ce coffret beige ...
- Il est réservé, Madame,
- J'ai vu le carton mais cet objet m'est familier. Je voudrais juste le toucher !
- c'est que ... il est en excellent état et le contenu en est fragile.
Le vieux monsieur invite son ami à le lui montrer.
Elle caresse délicatement le grain toilé du couvercle entre beige et gris.
Les pochettes de papier sont jaunies, elle commence à faire glisser ...
- d'un geste, il l'interrompt : c'est fragile, je vous ai dit.
-oui, mais pas en parfait état, le quatrième ou le cinquième était rayé, ...
- Ce doit être le quatrième, tenez, regardez là cette strie, l'aiguille sautait toujours à cet endroit dès l'origine !
Les deux compères se regardent de connivence.
- Aucun doute, vous êtes la personne que nous attendions.
- Mais ...
- Mon ami en est le vendeur, mais il y a mis une condition ...
- C'est possible, cela ?
L'homme aux mains de pianiste a dit doucement, oui, les objets ont une âme vous savez. Celui-ci vous a appartenu et il vous revient.
Il a délicatement refermé le coffret.
- Prenez, je vous dis, ce carton était mis pour vous.
Jeanne Fadosi
Le texte original, écrit fin mars 2009 pour Les parchemins de Bigornette se retrouve Chez l'antiquaire