Le froid est vif, je suis partie, comme toujours,un peu tard, et je me hâte vers la dictée du Téléthon de mon village.
J'hésite entre deux raccourcis piétonniers. Celui que je préfère risque d'être glissant. L'autre aussi et je le connais moins.
- Jaf, ouaf, Pstt, par ici, par ici.
" Quoi, encore des acouphènes. " Je secoue ma tête pour chasser ces sons bizzarres et pour tout dire, désagréables quoique assourdis.
- Mais non c'est moi, c'est nous, Faustine et Abel. Il faut que tu prennes le chemin qui borde le pré aux chevaux.
- Ah c'est vous ? Vous êtes sûrs ? Mais comment faîtes-vous pour me parler ainsi de loin ?
- C'est un secret entre nous. Ne le racontes pas. Déjà qu'on te prend un peu pour une sorcière. Tu pourrais bien te retrouver avec d'autres étiquettes un peu folles.
Je prends l'allée contre le vent. La neige encapuchonne les ornières et le sol dur fait un appui praticable. Au loin deux cavaliers rentrent leurs montures au pré. Le soir et l'ombre tombent sur la campagne apaisée. La nature apprivoisée, au coeur des habitations ...
- Ne vas pas si vite, regardes ! Tournes la tête sur ta gauche ! Ne vois-tu pas ces pattes fluettes qui se débattent vainement dans l'air ?
La pauvre bête roule doucement du flanc au dos. Mon regard a croisé son regard. L'agitation a cessé. Crainte de l'odeur humaine ? Espoir d'un sauvetage ? Je crois voir les deux dans ce regard plaintif, craintif, je ne sais. Que faire. Je vais rater la dictée. Tant pis ! Héler les cavaliers là-bas. Ce sont des cavalières. qui comprennent à mon troisième appel. Qui viennent. Elles ont l'habitude des chevaux, aiment les animaux. L'une d'elles rassure la bête. Elle ne saigne pas mais a sans doute quelque chose de cassé.
Une voiture se gare de l'autre côté, sur le parking et semble chercher. Je lui fais signe, quelle chance qu'il arrive justement. Mais ce n'est pas un hasard. On a déjà donné l'alerte et il cherchait à localiser le petit animal.
Peut-être même le conducteur ou la conductrice, surpris(e) par son irruption, et qui n'a pas eu d'autre choix que de le heurter, sauf à aller dans le décor sur la rue incertaine.
Il va l'emmener vers le garde forestier. Pourra-ton sauver ce faon, dont on voit le début des bois pointer pour le printemps prochain ? Est-il trop blessé pour être sauvé ?
Monsieur V ne le sait pas. Mais je sais qu'il fera au mieux avec le garde et le vétérinaire.
Je retourne vers la dictée. Mon petit quart d'heure de retard vexinois (mais oui, je sais qu'en Mayenne, c'est le quart d'heure mayennais et ailleurs, le quart d'heure ailleursais ...
La dictée parle du Bois d'où a surgi le faon, des époques où Mélusine et Merlin veillaient encore sur les rois chevelus et sur les manants ...
Ce soir (samedi). Une biche peut-être pleurera son faon.
Dis, Faustine, dis Abel, le savez-vous ?
- ...
- JB pour mercredi, fait danser les Gervaise. En voilà une idée ! Dites-moi qui c'est.
- Mercredi, tu le découvriras mercredi, comme d'habitude, pas avant. C'est la consigne, ne sois pas si impatiente.
références : Jody et le faon, film de Clarence Brown, 1946
Bambi, film d'animation de Walt Disney, 1942
inspiré par Bambi, Eine Lebensgeschichte aus dem Walde( Bambi, l'histoire d'une vie dans les bois), 1923, de Felix Salten
Hélas, trois fois hélas, j'avais laissé mon appareil photo à la maison !
Et pour les fautes d'orthographe, j'en ai sans doute encore laissé sur ce texte. Merci de me les signaler.